29 Juin 2021
L’Assemblée Nationale s’est prononcée, le 10 juin dernier, sur la proposition de loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France. A partir du mois de juillet, tous les téléphones et tablettes reconditionnés seront assujettis à la taxe de redevance pour copie privée dont le barème a été publié au Journal Officiel du 6 juin. Tous les intervenants du marché de seconde main sont mobilisés et montrent leur mécontentement face à cette commission qui risque d’asphyxiée le secteur.
Jusqu’à présent, seul les fabricants d’appareils Neufs payaient cette redevance qui permet de rémunérer les artistes et le monde de la création pour la copie privée de leurs œuvres sur des supports comme les tablettes, les mobiles intelligents et autres. Copie France, l’organisme chargé de la collecte de cette redevance prélève 12 Euros pour les Smartphones de 32 Go de capacité de stockage et 14 Euros pour ceux équipés de 64 Go et plus. Soit un montant global de 172 millions d’Euros représentant 70% des recettes provenant de la redevance pour copie privée pour la seule année 2019. Une commission qui financerait environ 12 000 projets culturels et soutiendrait quelque 200 000 artistes, chaque année.
En incluant les Smartphones et tablettes reconditionnés dans le lot des appareils assujettis à cette redevance, les ayants droits vont la collecter deux fois. La première auprès des fabricants et des importateurs et la seconde auprès des professionnels du reconditionné. Malgré un abattement de 40% par rapport au taux du neuf, les vendeurs de mobiles de seconde main vont quand même en pâtir. Mais qu’est ce exactement cette RCP ? Qu’est-ce qu’un mobile remis à neuf ? comment cette redevance va-t-elle lui être appliquée? Et pourquoi suscite-t-elle autant de colère chez les acteurs du reconditionné ?
La Redevance pour copie privée peut être définie comme une forme de licence légale nous autorisant, nous particuliers, à copier, pour un usage strictement privé et en toute légalité de la musique, des films, des séries et autres œuvres culturelles sur nos appareils. Elle existe depuis 1985. Cette rémunération récoltée par l’organisme Copie France est donc reversée à 75% directement aux auteurs, artistes, créateurs, producteurs... et les 25% restant au soutien des manifestations culturelles, au développement et à la formation des artistes et auteurs…
Sachez donc que quel que soit l’appareil que vous achetez, Smartphone, tablette, disque dur externe, clé USB…à partir du moment où il dispose d’une capacité de stockage, son prix d’achat inclus automatiquement le montant de la RCP. Cette rémunération est, en effet, prélevée à la source et donc directement auprès des producteurs et des importateurs de supports numériques et d’appareils servant à faire des copies. Elle est bien sûr ensuite répercutée sur le consommateur final. Seule exception faite, les Smartphones achetés par les professionnels. Ces derniers profitent d’une exonération.
Au jour d’aujourd’hui, plus de doute, l’Assemblée Nationale a tranché. Tous les mobiles intelligents ainsi que les tablettes reconditionnés, toutes marques et prix confondus, seront soumis à la Redevance Copie Privée à partir du 1e juillet. Mais avant d’aller plus en détail dans le sujet, rappelons ce qu’est un Smartphone de seconde main.
Le reconditionnement est la remise à neuf d’un appareil, dans notre cas d’un Smartphone, déjà utilisé pour le revendre à un second utilisateur, à un prix inférieur à celui du neuf. Il est remis en état par un professionnel qualifié qui contrôle son origine, vérifie son état de fonctionnement et remplace les composants défectueux si nécessaire. Une fois remis sur le marché, il est donc parfaitement opérationnel avec toute fois de petits défauts esthétiques et parfois une baisse de l’autonomie de la batterie, raisons pour lesquelles les mobiles reconditionnés sont classés par grade. Ils peuvent être de grade A soit comme neuf avec une coque, des tranches et un écran en excellent état, de grade B soit en bon état avec de légères traces d’usures et quelques petites rayures ou encore de grade C soit dans un état correct avec des rayures plutôt voyantes sur la dalle et des marques d’usure sur le reste des façades avant et arrière. Mais quel que soit l’état d’un mobile remis en état, son prix reste très abordable par rapport au même modèle en neuf, parfois plus de 50% moins cher.
Notez que l’élément prix est l’argument principal des revendeurs du marché de seconde main d’où leur colère à l’annonce de l’application de la Redevance Copie Privée sur leurs Smartphones et tablettes ; car même avec un taux inférieur à celle pratiquée sur les appareils neufs, cette commission reste un point bloquant pour les acteurs français de ce secteur qui doivent encore réduire leurs marges pour rester compétitifs par rapport à leurs concurrents Européens et asiatiques. En effet, même avec une ristourne de 40% pour les Smartphones et de 35% pour les tablettes, cette taxe reste un frein vivent contesté par les reconditionneurs. Pour l’exemple, pour un mobile remis à neuf de capacité de stockage de 64 Go, la RCP est de 8,4 Euros quel que soit son prix de vente.
A LIRE : Best Price Market : l’adresse incontournable pour acheter son SmartphonePour une raison très simple et légitime : sauver leur activité menacée par la Redevance Copie Privée. Les argumentes qu’ils présentent : une double commission déjà prélevée une première fois lors de la vente du smartphone neuf, une concurrence essentiellement asiatique qui proposent des prix très bas auquel le seul choix, pour rester dans la course, est de s’aligner, des clients qui achètent reconditionné principalement pour les prix bas que ce marché propose et des marges déjà très faibles ne leur permettant pas de supporter cette redevance sans la répercuter sur le consommateur final. Sur la vente d’un iPhone 8 reconditionné, par exemple, le revendeur ne dégage que 18,33 Euros de marge. Que peut-il faire devant une RCP de 8 Euros si ce n’est de faire des économies sur d’autres postes et notamment sur la masse salariale !
Face à toute cette tension et en attendant une seconde lecture du texte au Sénat, les députés ont tenté quelques petits assouplissements comme le changement du barème fixé vers la fin de l’année 2022 et l’exonération des acteurs de l’économie sociale et solidaire. Mais cette affaire va continuer à faire parler d’elle puisque l’UFC-Que Choisir a déjà déposé un recours auprès du conseil d’état et sera probablement suivie par le Sirrmiet, une fédération d’entreprises du secteur. Les acteurs du reconditionné ne veulent pas parler de compromis. Ils veulent la suppression de cette taxe.
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